dimanche 29 décembre 2013

Dérive des continents


      Une route noire gravillonnée monte en pente douce. Et pourtant bien qu'elle soit douce, que mon vélo souplement accomplit sans heurt chaque tour de roue, en freinant trop fort je me trouve par terre. Gravillons renversés sur la tête qui roulent, pointus maigres, plantent malicieusement leurs crocs assidus dans les cheveux, roulent, les gravillons dans la tête, ça fait un bruit comme bâton de pluie, s'entrechoquent ainsi font fête et puis roulent. Tête qui roule, comme une pierre, avec tout le poids, toute la lourdeur et ses angles par quoi elle épouse le sol. Mais une pierre, quand brutalement elle est jetée par terre, quand surtout c'est cette route dure et noire gravillonnée, sans doute elle se brise en morceaux qui se déplacent, vibrants comme des plaques tectoniques. 
     Et toute la pluie des gravillons se déverse dans l'espace vide de ces continents qui se détachent, voilà, tournant dans l'Histoire : cette route noire, et ces gravillons impossibles, ces gravillons qu'on aura beau balayer, sans succès, toujours là, pas de route sans gravillon, ils reviennent, ils grouillent, ils ne partent pas. Il y a des routes à présent, de larges routes tortueuses ici dans la tête par où les gravillons pointus maigres se pressent en roulant, bruyants, méchants, de ces pierres qui s'entrechoquent faisant fête, roulent dans la tête, feront de ces espaces tout neufs et vides, ces creux entre les plaques, creux d'un monde nouveau, des océans, des mers, des rivières.  


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire