mardi 24 juillet 2012

Paris à ces heures

Des gens. Des gens assis les uns sur les autres, collés aux vitres, coudoyant des inconnus et qui attendent, et qui prennent l'air de penser à autre chose, des gens dont les deux extrémités des lèvres n'en finissent pas de tomber, quand levant les yeux regardant à travers les vitres, ils calculent en silence le temps qu‘il leur reste à passer là. Mais il fait noir et les vitres font miroir plus profonde se fait la foule immobile et rapide. Et la lumière est intermittente, une ampoule qui ne fonctionne plus, le wagon vacille de droite à gauche dans un bruit de ferraille affûté tranchant - transperçant. Le wagon est noir deux secondes, il est noir dix secondes et quand la lumière vient c'est ce gouffre d'inconnus remuants qui se reflète dans les vitres immenses. Les élans nasillards de l'accordéoniste monté discrètement commencent à trottiner dans mes veines et oh ! Non. Dix arrêts, encore et l’accordéon -, encore à rester là, sans pouvoir bouger ; car il y a trop de personnes immobiles - il siffle - immobiles autour de moi ; et si cette lumière pouvait cesser son cliquetis d'insecte et si ce grouillement triste murmures doigts qui claquent téléphones, touches du téléphone, appel téléphonique, sonnerie du téléphone, stridulations dans le wagon, murmures et doigts qui craquent - si tous ces bruits se déliaient tout d'un coup à l'air pur, alors mon sang cesserait de s'affoler ainsi, et les petites pattes crochues de l'accordéon ne pourraient plus trotter dans mes veines. Mais enfin ma tête bourdonne, il fait chaud, il reste dix arrêts, encore, dix arrêts, à attendre, et la lumière qui s‘insinue toujours, brûlante d‘un venin impalpable, m'aveugle, tandis que les gens s'entrechoquent au moment de l'arrêt - mais ce n'est pas encore celui là. Le wagon se lève il s‘en va, reprend son vacillement et je serre un peu plus fort l'inutile barre de maintien quand trois nouveaux inconnus viennent se coller à moi parce qu'il n'y pas de place.

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