mardi 24 octobre 2017

lieux vides avec fantômes IV



      Long jardin à dérouler, dans lequel on ne peut pénétrer qu'en employant un détour et quelques ruses. Toutes les fenêtres sont éclatées. Il arrive que la serre soit morte, aussi n'y a-t-il pas une plante dans les pots dispersés. Les feuilles s'amassent d'un automne à l'autre, toute organisation est rompue, l'eau s'écoule à l'intérieur par habitude, sans se gêner, sans rencontrer d'obstacle. 


     Ailleurs la plante a repris ses droits. Dans l'ombre et le silence, la voûte de la serre rappelle la coque d'un bateau renversé et je marche doucement, dans les débris d'outre-monde. J'observe les oublis, ce qu'un ancien passager a laissé, dans l'urgence du départ. Aussi les plantes, longtemps sages et dociles, sans plus sentir ni mouvement ni rumeur, se sont mises de concert à réoccuper l'espace. Avec la discrétion des grands timides, lentement, elles sortent de leurs quartiers, s'approprient des lieux qui ne leur étaient pas réservés, se ménagent une place plus grande en poussant, dans leur épaisseur, le pot, la pierre immobiles, qui avaient siégé là. 





    Seule, à présent, imposante et silencieuse, la plante règne, au fond de la serre, laisse libre court à sa morne folie. D'un ton impérieux, elle ordonne le désordre.




 




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